mercredi 17 juin 2009

Vends maison où je ne veux plus vivre

Une chose qu'il me faudrait faire plus souvent, c'est rédiger le compte rendu de mes lectures. Et pourquoi pas les publier ?

Globalement, la majorité des livres que je lis le mériteraient, mais au final, j'oublie de le faire.

---------- ----------

Mais aujourd'hui, j'y pense ! Et de surcroit, je viens d'en finir avec la lecture de Vends maison où je ne veux plus vivre, de l'écrivain tchèque Bohumil Hrabal !


Qu'est-ce ?

Je définirais ce livre, comme un recueil de nouvelles atypique. Le terme de "nouvelle" me dérange, car, si les histoires sont bien distinctes, elles n'en sont pas moins reliées. Mais peu importe. Le cadre, c'est une Prague communiste, avec tout ce que cela implique de propagande, de dénonciations, de pauvreté, d'humour noir.


Ce que je retiens de cette lecture ?

C'est le génie dont fait preuve l'auteur pour rendre l'horrible anodin, pour mettre la douleur sur le même plan que les petits bonheurs quotidiens, de nous faire rire malgré le tragique de la situation. Il ose superposer le poétique et le vulgaire, et ne passe jamais à côté du détail qui donne à la situation son côté pathétique.

Et au final, c'est toujours au second plan que la fille éméchée se fera violer, que la femme se fera battre par son mari, que l'ouvrier se fera étrangler par un câble d'acier brûlant. Ce que le lecteur suivra principalement sera le débat sur l'avenir du monde que se livrent les camarades du violeur, ou le récit d'une vie quotidienne banale, décrivant l'aspect répétitif de la vie du narrateur.


Des extraits !

"Eh bien, messieurs, avec tout ce que vous m'avez dit toutes ces années, moi, je vais écrire un roman. Et s'ils ne veulent pas le publier, je l'enverrai à la police, ça fera toujours une dénonciation"

----------

Et je rentre à la maison, ma fille blême de terreur, ma femme aussi, en mangeant elles renversent des cuillerées de soupe sur la nappe, [...], mais moi tout cela me réjouissait, me faisait sourire ; elles étaient plus abasourdies que si je m'étais mis à hurler, à menacer, à frapper, et là où je leur ai fait le plus peur, c'est quand j'ai apporté la boîte. [...] Dedans, des gâteaux, des choux à la crème, je leur tends la boîte, mais ma femme et ma fille vont se plaquer contre la cloison, [...] elles étaient là avec ces gâteaux que je leur avais apportés pour la première fois, elles avaient chacune à la main un chou à la crème, mais elles étaient incapables d'en avaler une bouchée.

----------

Et quoi de mieux, pour clôturer la symphonie pathétique de Tchaïkovski, que cette réplique haineuse, lancée par un groupe de vieilles femmes frustrées :

"Toutes ces femmes à gros nichons, en taule ! Leur couper les mains. Leur arracher la langue. Les envoyer chez le vétérinaire, les faire castrer !"

---------- ----------

Je ne m'attendais à rien de spécial en entamant cette lecture, ne connaissant rien de Hrabal. Et c'est ainsi que j'ai pu être pleinement surpris. Au début, c'était plutôt une incompréhension mêlée de révulsion... "Mais, c'est horrible, ce qu'il vient de dire sur un air anecdotique !?" Parfois, on a l'impression déroutante de sauter du coq à l'âne. Ensuite, on commence à saisir l'étendue de la recherche littéraire, dramatique, qui donne à l'ouvrage son côté burlesque, pathétique, hillarant, ou amer.